«L'urologue, le gynécologue de l'homme», si nous avons souhaité utiliser ces mots pour capter l'attention, il ne faudrait pas oublier que derrière cette formule quelque peu caricaturale et réductrice se cache une réalité qui nous oblige à revoir le rôle de l'urologue et la mission de notre société savante pour les années à venir.
Oui, nous sommes, les urologues, tout aussi bien médecins que chirurgiens et oui, nous sommes les spécialistes de la santé de l'homme.
Aujourd'hui, nous sommes obligés de nous rendre à l'évidence : le vieillissement de la population est aujourd'hui une réalité, L'homme âgé d'hier n'est pas celui-ci d'aujourd'hui et encore moins celui de demain. Nos patients attendent de nous une nouvelle approche et une relation médecin-patient renforcée.
Comment atteindre cet objectif sans reconnaître que la santé de l'homme n'a jamais été une réelle priorité dans notre société, que, le plus souvent, nous ne rencontrons nos patients que tard dans leur vie! ? Pourtant, et même si nous n'entretiendrons pas le lien gynécologue -patiente, qui s'est construit au fil des années, il est de notre devoir de prendre en compte l'homme dans sa globalité.
Qu'il s'agisse de prévenir les maladies cardiovasculaires et le diabète, dont le précurseur, le syndrome métabolique, est bien souvent découvert lors d'une consultation pour une hypertrophie bénigne de la prostate, de prendre en charge la baisse de libido ou les dysfonctionnements sexuels et, bien évidemment de coordonner l'ensemble de l'équipe multidisciplinaire lors d'un cancer de la prostate ou d'une tumeur de la voie excrétrice supérieure, l'urologie est aujourd'hui une discipline à multiples facettes, multiples expressions.
De fait, cette sur-spécialisation ne doit pas nous faire perdre de vue que c'est une prise en charge globale et humaine qu'attendent les patients.
Le nouvel urologue est celui qui saura concilier éducation à la santé, éducation thérapeutique, prise en charge médicale ou chirurgicale coordonnée et richesse de la relation médecin-patient.
La nouvelle AFU est là pour accompagner tous les urologues et tous les professionnels de santé impliqués en urologie et leur permettre de répondre à cet enjeu encore trop souvent ignoré : la santé de l'homme.
Pr Jean-Luc Descotes
Président de l'AFU, CHU de Grenoble
Dr Christian Castagnola
Vice-Président de l'AFU, responsable du comité d'Éthique et de Déontologie, Mougins
La France compte 1 200 urologues soit un urologue pour 60 000 personnes. Cette spécialité mal connue, est en pleine mutation. Avec l'augmentation de l'espérance de vie, l'urologie, qui s'adresse à tous les âges de la vie, mais plus particulièrement à l'homme de plus de 50 ans est, plus que jamais, une discipline d'avenir.
On les appelait des lithotomistes1. De l'Antiquité au Moyen Age ces chirurgiens ambulants avaient pour spécialité de "tailler la pierre dans la vessie", autrement dit tenter d'extraire ces fameux calculs qui provoquent d'intenses douleurs. Montaigne en a témoigné. Et tant d'autres hommes célèbres (Cromwell, Franklin Darwin, Newton!) en ont souffert !
Aujourd'hui, les calculs urinaires restent l'apanage de l'urologue. Mais c'est loin d'être la principale activité de ce médecin et chirurgien, spécialiste de l'appareil génital et urinaire. Depuis la création de l'AFU il y a plus de 100 ans (1896) et la naissance de l'urologie moderne, le champ d'action de l'urologue a beaucoup évolué.
Chirurgien mais pas seulement
Le chirurgien urologue se consacre au diagnostic et au traitement des atteintes des appareils urinaires masculin et féminin (rein, bassinet, uretère, vessie, urètre) et de celles de l'appareil génital masculin (prostate, testicule, verge), que ces atteintes soient congénitales, infectieuses, traumatiques, dégénératives, hormonales ou tumorales. Il est également le spécialiste de référence pour les troubles de la statique pelvienne chez la femme et pour la transplantation rénale.
L'urologue est chirurgien mais il est également médecin. Cette précision n'est pas inutile car trop de patients pensent encore lorsqu'on les oriente vers l'urologue, que ce dernier va forcément les opérer. Il n'en est rien. L'urologue prend en charge les pathologies de façon globale. Il interroge le patient, l'examine, prescrit les examens para cliniques complémentaires éventuels et propose un traitement qui peut être médical -le rapport 2013 de l'AFU était d'ailleurs consacré aux médicaments en urologie -ou chirurgical.
Les domaines d'expertise de l'urologue concernent aussi bien la cancérologie qui représente presque la moitié de son activité, que les troubles mictionnels de l'homme (30 % de l'activité d'un urologue), l'incontinence féminine ou masculine, les infections (cystites, prostatites, pyélonéphrites), les célèbres "calculs" (lithiases), l'insuffisance rénale, les greffes, les dysfonctionnements de l'appareil génital de l'homme, les troubles urinaires et les malformations de l'appareil génital de l'enfant et l'adolescent, et tous les autres troubles de l'appareil génito-urinaire, qu'ils soient d'origine neurologique ou traumatique.
Deux situations principalement conduisent un homme à consulter un urologue. La prise en charge des maladies prostatiques (gênes mictionnelles et cancer) et les dysfonctions sexuelles.
L'association très forte entre les troubles urinaires et sexuelles et l'existence d'un syndrome métabolique, place l'urologue au cœur d'une prise en charge beaucoup plus globale de l'homme et le conduit, bien souvent, à orienter son patient vers un cardiologue. La dysfonction sexuelle est aujourd'hui considérée comme un symptôme ‘sentinelle’, pour les maladies cardiovasculaires.
En ce qui concerne le cancer de la prostate (56 841 en 2012) et les autres cancers de l'appareil urinaire et génital (vessie, rein, TVES!), la cancérologie fait partie intégrante de l'activité de l'urologue. C'est l'urologue qui diagnostique, prescrit les examens complémentaires, et propose la stratégie thérapeutique validée dans le cadre des RCP (réunion de concertation pluridisciplinaire en oncologie). C'est encore l'urologue qui établit le traitement médical, qui opère si cela est nécessaire, assure le suivi-post opératoire ou encore les soins de support. L'urologue assure 95 % de la prise en charge initiale du cancer. Pour certains patients il peut faire appel à d’autres spécialistes comme par exemple les radiologues interventionnels, les radiothérapeutes ou les oncologues pour une prise en charge multidiciplinaire.
L'incontinence est un autre exemple intéressant. Ce symptôme peut relever de divers mécanismes purement mécaniques, neurologiques ou dégénératifs (incontinence à l’effort, urgenturie, incontinence mixte!). L’urologue va analyser la situation pour proposer une prise en charge adaptée à chaque situation (traitements médicamenteux, comportemental, rééducation, neuromodulation, chirurgie, pose de bandelettes!).
Enfin l'urologie pédiatrique se situe elle aussi à la frontière entre deux spécialités. Exercée par des urologues ou des chirurgiens pédiatres ayant acquis une compétence particulière, elle se consacre à l'étude et au traitement des troubles de l'appareil urinaire de l'enfant. La correction des malformations congénitales (ectopie testiculaire, hypospadias, épispadias, reflux vesico-urétéral!) constitue le cœur de la pratique. Mais elle traite également de pathologies infectieuses ou tumorales.
L'andrologue, le gynécologue de l'homme!
L'étude et le traitement des troubles de la reproduction masculine, troubles de l'érection, de l'éjaculation, de la fertilité constituent l'andrologie qui est partie prenante de l'urologie. L'andrologie est un peu le pendant pour l'homme de la gynécologie pour la femme. A ceci près qu'en général, la femme, depuis la puberté, a noué une relation avec son gynécologue. La situation diffère pour l'homme. Soit l'homme a consulté de manière ponctuelle un urologue en raison d'une pathologie congénitale, d'un traumatisme, d'un trouble de la fertilité ou encore d'une lithiase. Une fois le problème réglé, il ne revoit plus l'urologue. Soit l'homme découvre l’urologue au décours de la cinquantaine. Voire beaucoup plus tardivement car de nombreux freins existent à la consultation. Bien des hommes ignorent même l'existence de l'urologie et ne savent pas avec quel spécialiste évoquer leurs problèmes urinaires ou sexuels. La peur, le tabou sont aussi des facteurs limitants. La fatalité également : la conviction qu'il est normal, à partir d'un certain âge, d'être confronté à certains "petits soucis" liés au vieillissement conduit à retarder le recours au spécialiste. Or l'urologue joue un rôle central dans la prise en charge du déficit androgénique lié à l'âge, un trouble caractérisé par une baisse des hormones mâles et de nombreux symptômes associés : fatigue, diminution de la libido, troubles de l'humeur!
La recherche est très active en urologie. En particulier dans le domaine des facteurs de risque génétiques et environnementaux. L'objectif est de développer des marqueurs prédictifs, notamment en cancérologie. La pratique a par ailleurs considérablement évolué ces dernières décennies avec des interventions de moins en moins invasives : forte réduction des chirurgies "ouvertes", développement de la chirurgie assistée par robot (Da Vinci), interventions percutanées, lithotripsie extracorporelle, biomatériaux, amélioration constante des endoscopes qui sont de plus en plus fins, de plus en plus flexibles et peuvent aller à l'intérieur même du rein, apparition des ultrasons focalisés (HIFU, Focal One), des lasers!
L'enseignement n'est pas en reste.
• ECU (Enseignement du Collège d’Urologie) cycle d’enseignement gratuit pour les internes en parallèle de l’enseignement de la faculté.
• Gestion du risque : Urorisq
• Congrès et formation continue des urologues
Enfin, l'AFU s'est dotée d’un comité d’éthique et de déontologie propre à la spécialité.
Références :
1 http://nephroblog.org/2013/11/09/il-etait-une-fois-la-maladie-de-la-pierre/
2 http://urofrance.org/fileadmin/medias/afu/urologie-afu.pdf
3 http://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2011/donnees/organes/06-rein/synthese.htm
4 http://www.renaloo.com/actualites2/les-dernieres-actualites-liste/1231-activite-de-greffe-de-rein-en-france-en-2013-
les-premiers-chiffres-du-bon-et-du-moins-bon
5 http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1089
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