La FNESI et le CEFIEC d'une même voix dénoncent la "fausse bonne idée" d'un cursus de formation infirmière en 4 ans. La FNESI et le CEFIEC, qui représentent les acteurs évoluant au quotidien au cœur de la formation infirmière initiale, s'insurgent contre la proposition d'allongement de la formation infirmière à 4 ans. Cette suggestion, portée par des protagonistes éloignés de la réalité de terrain et de la formation, ne prend pas en compte les besoins et les attentes des étudiants, des formateurs et plus largement du système de santé.
Actuellement, aucune étude n'a été réalisée permettant de mesurer notamment l'impact financier, social, bâtimentaire d'une année supplémentaire tant au niveau des financeurs, des régions, des employeurs, des familles, des étudiants ...
Par ailleurs, allonger la formation à 4 ans, c'est ajouter une année supplémentaire dans le parcours des étudiants en sciences infirmières qui pour un grand nombre d'entre eux sont déjà en difficulté financière ou en risque de l'être. En outre, cette mesure risquerait d'accentuer les arrêts de formation et de dissuader l'orientation vers cette formation.
Une quatrième année = un frein à l'attractivité de la formation et de la profession infirmière.
Dans un contexte de pénurie d'infirmiers et d'infirmières, retarder l'arrivée sur le terrain de 30 000 diplômés au cours d'une année blanche met en péril l'accès aux soins et menace la qualité des prestations ainsi que la sécurité des patients. Par ailleurs, le statut d'infirmier « junior » au cours d'une hypothétique 4e année ne permettrait pas un exercice en autonomie professionnelle. De plus, la loi du 29 janvier 2025 imposera un nombre minimum de soignants par patient hospitalisé, rendant indispensable l'intégration rapide de nouveaux professionnels qualifiés et compétents dès 2027.
Une quatrième année = un déficit de plus de 30 000 infirmiers et infirmières.
La formation en 3 ans est conforme à la directive européenne. Le modèle, comportant 4 600 heures de formation réparties sur 180 ECTS en trois ans, répond pleinement aux exigences européennes tout en garantissant une formation efficace et en priorisant le bien être des étudiants. Ajouter une quatrième année, en France, remettrait en cause la transposition des accords de Bologne dans le système universitaire français sur le format Licence-Master-Doctorat (LMD) et risquerait de complexifier un système universitaire déjà éprouvé.
Il est également nécessaire de rappeler la diversité de la durée de la formation infirmière initiale au sein de l'Europe comme le soulignent de nombreuses études (Kajander-Unkuri et al., 2021; Lahtinen et al., 2014; Taneva et al., 2023). Plus généralement, cette diversité est également observable si l'on compare les durées des parcours de formation conduisant à la licence en Europe. Lors de l'universitarisation de la formation infirmière initiale, la durée de celle-ci a souvent été calquée sur le format national de licence utilisé dans l'enseignement supérieur de chaque pays.
En outre, analyser un programme de formation infirmière initiale professionnalisant et académique ne peut se limiter au prisme de la durée du programme. Ce type d'analyse impose l'adoption d'une approche systémique. Il est en effet nécessaire de prendre en compte le parcours de formation de l'étudiant avant son entrée en formation infirmière et de distinguer dans le programme les contenus qui visent à éduquer l'être humain de ceux qui ont une vocation purement professionnalisante. C'est en réussissant cette fusion que l'être humain devenu infirmier pourra allier ses caractéristiques personnelles et professionnelles dans son exercice infirmier quotidien.
Une telle réforme pourrait également freiner l'employabilité des infirmiers nouveaux diplômés en encourageant une poursuite d'études sans passage par l'exercice infirmier clinique, éloignant ainsi la formation du modèle européen.
Une quatrième année = un frein à l'accès au métier et une rupture avec le modèle universitaire français LMD
Comment envisager l'avenir des formations infirmières de niveau master (IPA, IADE, IBODE) après quatre années d'études initiales ? Cette réforme constituerait également un coup d'arrêt à la réingénierie de la formation des puériculteurs déstabilisant ainsi l'ensemble du parcours de formation.
Une quatrième année = une mise en péril de l'organisation des formations de la filière infirmière et par voie de conséquence du système de santé.
La FNESI et le CEFIEC, garants de la formation infirmière en France, alertent sur une proposition éloignée des réalités de terrain ignorant les enjeux actuels du système de santé. Moins que la durée, c'est avant tout la place accordée aux innovations pédagogiques mais également les caractéristiques des environnements cliniques qui accueillent les étudiants dans une formation qui feront la différence. Le défi à relever dans ce domaine est un enjeu majeur.
[1] · Kajander-Unkuri, S., Koskinen, S., Brugnolli, A., Cerezuela Torre, M., Elonen, I., Kiele, V., Lehwaldt, D., Löyttyniemi, E., Nemcová, J., De Oliveira, C. S., Palese, A., Rua, M., Salminen, L., Šateková, L., Stubner, J., Sveinsdóttir, H., Visiers-Jiménez, L., & Leino-Kilpi, H. (2021). The level of competence of graduating nursing students in 10 European countries-Comparison between countries. Nursing Open, 8(3), 1048‑1062. https://doi.org/10.1002/nop2.712
· Lahtinen, P., Leino-Kilpi, H., & Salminen, L. (2014). Nursing education in the European higher education area-Variations in implementation. Nurse Education Today, 34(6), 1040‑1047. https://doi.org/10.1016/j.nedt.2013.09.011
· Taneva, D., Paskaleva, D., & Gyurova-Kancheva, V. (2023). Nursing Education in some European Higher Education Area (EHEA) Member Countries : A Comparative Analysis. Iranian Journal of Public Health. https://doi.org/10.18502/ijph.v52i7.13243
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