Ece EGE, créatrice de la ligne Dice Kayek.
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Pourriez vous nous raconter votre formation / votre parcours professionnel ?
Comment est née votre marque Dice Kayek ?
Ece Ege:
j'ai étudié à Paris dans une école de mode. Après avoir gradué de l'école, j'ai créée la marque Dice
Kayek avec ma soeur, dont la collection étant constituée de 10 chemises en popeline blanche
seulement. 4-5 collections après, suite à la demande des clients, nous avons commencé à créer des
vêtements complémentaires aux chemisiers, comme des pantalons, jupes, vestes, manteaux...
Ainsi est née la marque Dice Kayek.
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Vos origines turques vous influencent-elles dans vos créations ?
Ece Ege:
Sûrement ! Je suis une personne multiculturelle, d'où l'infrastructure géopolitique de l'empire
Ottoman. Je suis élevée dans un pays qui est le seuil entre l'Occident et l'Orient, dont la vie
quotidienne est un mélange perpétuel des cultures et des traditions occidentales et orientales.
C'est très enrichissant, agréable. On ne s'ennuie jamais. Je trouve des sources d'inspiration en
permanence, partout où je vais en Turquie.
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Vous travaillez avec votre sœur Ayse, la mode est une affaire familiale pour vous ?
Ece Ege:
Elle l'est. S'il n'y avait pas ma soeur avec moi dans cette affaire archi-difficile, je ne la ferais pas
jusqu'à aujourd'hui. On se soutient mutuellement, surtout moralement, ce qui est indispensable
dans notre vie professionnelle.
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Votre succès est-il le même en Europe, en Turquie et ailleurs dans le monde ?
Ece Ege:
Je pense que mon succès fait plus d'échos dans mon pays qu'ailleurs. Parce que malheureusement
pour réussir, pour se faire entendre dans la mode, il faut résider dans ces quatre fameux centres de
la mode ; New York, Londres, Milan ou Paris. Si la réussite vous arrive, dans une de ces quatre
villes où il y a des maisons grandioses, institutionnelles, avec lesquelles toute autre marque de
mode, petite, moyenne, fait la concurrence, vous êtes critiqué avec les mêmes yeux des autorités,
qui vous voient au même niveau que les autres maisons de luxe, celui des « trends setters ». Mais
c'est une routine à Paris. Vous êtes obligé de réussir ! Sinon, vous êtes barré de la liste assez vite.
C'est un peu cruel le monde de la mode. Donc réussir à Paris a un très grand impact dans mon
pays qui a un énorme besoin de créer, développer, et exporter ses marques créatives, spécialement
dans le domaine du textile dans lequel la Turquie a tellement investi en argent et en subventions.
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Avez-vous le sentiment d'incarner « l'intégration turque réussie » en Europe ?
Ece Ege:
Je n'ai pas le sentiment, mais la conviction, d'incarner une bonne image de la créativité Turque en
Europe. C'est une vérité absolument qu'il y a un potentiel énorme, grâce aussi aux subventions,
pour des jeunes créatifs, pour qu'ils créent leur propre marque non pas seulement dans la mode
mais dans d'autres domaines de la création. Je crois que si les exemples de la réussite se
multiplient et la Turquie a quelques grandes marques mondiales, pas beaucoup, 2 ou 3 suffisent,
toute une nouvelle génération des jeunes derrière nous va suivre ces exemples à grands pas. Elle
sera très très chanceuse, par rapport à notre génération qui est la battante, la lutteuse sans relâche
sur ce chemin épineux vers le constitutionalisme, pour arriver au point que nous sommes
aujourd'hui, en beaucoup moins de temps, en suivant notre exemple et en étant plus consciente
que nous dès le début de leur vie professionnelle.
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Que vous a apporté l'ouverture de votre boutique sur Paris ?
Ece Ege:
L'ouverture de notre première boutique est un deuxième pas vers l'avant dans notre métier. Il le
fallait depuis un moment d'avoir un magasin monomarque qui se situe dans une belle rue
Parisienne de prestige. Avoir sa propre boutique sur la rue est avant tout une énorme publicité
pour la marque de 12 mois sur 12, ainsi c'est un bon moyen de présenter son identité, son
univers, au public.
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Avez-vous d'autres projets, tels que l'ouverture d'autres boutiques ?
Ece Ege:
Si Dieu le veut, évidemment notre souhait est d'ouvrir une deuxième, troisième boutique, à New
York, à Tokyo, à Istanbul...
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Un petit mot pour nos lecteurs, la génération des 18-25 ans, qui seraient intéressés par les métiers de la mode et de la haute couture ?
Ece Ege:
Vous souhaitez faire de la mode comme métier, préparez-vous ! Ca ne sera pas facile et pas
toujours glorieux. Créer sa propre marque de mode et en faire une marque mondialement connue
est quasi impossible aujourd'hui. Les « très talentueux » (le talent est un Don de Dieu ; on naît
avec, créer ne s'apprend pas.) peuvent faire partie d'un grand groupe industriel et financier qui les
soutiendront dans leur démarche. C'est une très faible possibilité au vu des circonstances de
l'économie mondiale d'aujourd'hui. Où ils peuvent s'intégrer dans le studio d'une maison et
programmer leur ascension hiérarchique dans le métier jusqu'à devenir la personne créative
indispensable, le D.A., etc...
Dans notre métier le bracelet en or est le très bon modélisme, au point que si vous maîtrisez
vraiment la bonne et parfaite coupe, ce poste est un des postes les mieux payés. Le modélisme,
pour moi en tous les cas, est la partie la plus créative de la collection. Le modéliste est la personne
qui « donne vie » au dessins, sans lui les plus jolis croquis ne resteraient que des traits de stabilo
sur une feuille blanche ! ...
Tous nos remerciements à Mme Ece EGE.
Caroline Robert.