Quel est le principe du médical design ?
Je suis designer spécialisé dans le domaine de la santé au sens large : je travaille à la fois sur les outils de médecins chirurgicaux qui vont être utilisés dans des opérations, mais aussi sur la robotique avec des labo de recherche.
Je travaille en ce moment sur un robot d'aide à la marche, de rééducation de la marche. Cela va aider les personnes ayant eu un AVC à faire une rééducation complète de la marche.
Je travaille aussi sur le bien-être des personnes âgées et handicapées avec la notion de design pour tous avec des sociétés basées sur ce concept.
Je travaille également sur la recherche en design : en fait, je réfléchis sur les produits pour les personnes malades, âgées et handicapées comme par exemple le pilulier.
Je réfléchis donc sur les matières qui pourraient mettre de la chaleur aux produits médicaux, comme la céramique et le bois.
Tout cela pour avoir des objets agréables, jolis et pratiques.
Qu'avez-vous déjà conçu pour faciliter la vie quotidienne des personnes âgées ?
Ce ne sont que des projets pour le moment. Je suis jeune et ma boîte existe seulement depuis un an.
Mais je réfléchis sur le pilulier qui demande une durée de 3 ans environ pour voir le projet aboutir.
Le principe est simple : la personne âgée doit prendre tant de médicaments par jour. On se pose alors plusieurs questions : qui apporte les médicaments, qui remplit les piluliers, etc. On crée donc un produit pour quelqu'un. On ne va pas faire juste un pilulier pour les médicaments matin, midi et soir. On personnalise, cela n'a pas le même usage. La différence d'utilisation n'est pas la même.
Pour ce qui est du déambulateur, je cherche actuellement un fabricant.
Vous pouvez voir sur mon site tous mes différents projets.
Pourriez-vous développer le projet qui, pour vous, est le plus utile au quotidien ?
Je travaille avec une entreprise sur la PDA (préparation des doses à administrer). C'est une nouvelle manière de distribuer les médicaments à domicile.
Plutôt que d'avoir 15 boîtes de médicaments, le pharmacien va remplir le pilulier en début de semaine et le fermer avec un blister pour un usage unique.
La personne âgée saura donc exactement ce qu'elle doit prendre. Et cela diminue ainsi les risques de problèmes médicaux qui surviennent après une mauvaise prise médicamenteuse responsable de près de 10 000 décès par an en France.
C'est un projet très intéressant !
C'est un pilulier mais différent de ce que l'on peut déjà connaître.
Sinon il y a également le déambulateur.
Une béquille qui a un aspect médical, il n'y a aucun problème car elle a une visée temporaire : par exemple je me suis cassée la jambe et je vais devoir me servir d'une béquille pour 4 semaines.
Mais pour un déambulateur on se pose la question : est-ce que je vais le garder jusqu'à la fin de ma vie ? Généralement oui. Cela doit donc être le plus esthétique et pratique possible.
Pourquoi avoir choisi de travailler sur le design médical ?
Je connais bien le milieu médical car j'ai commencé à travailler en soins de suite moyen séjour en CHU lors de l'été de la canicule. C'était un job d'été qui m'a beaucoup interpellé. Cela m'aide beaucoup aujourd'hui d'avoir vécu cette expérience en gériatrie.
Pendant mes études, j'ai aussi travaillé sur les problèmes médicaux et notamment pour Alzheimer. Le principe est de faire une horloge qui s'illumine au cours de la journée les lieux de vie à utiliser. Ce n'est pas une obligation, cela ne sonne pas mais c'est un rappel ponctuel.
Il y a aussi un tapis de présence pour éviter les déambulations nocturnes qui va créer une lumière près des toilettes qui va alors attirer la personne.
On préconise les chemins lumineux mais le tapis ne fait qu'un point lumineux très fort, ce qui est plus facile pour la personne atteinte de la maladie d'Alzheimer. Il faut savoir que lorsque la personne se lève, même à 4 heures du matin et qu'il y a de la lumière, elles pensent que c'est le début de la journée.
Comment procédez-vous pour la création de vos projets ?
Il y a beaucoup d'observations, d'analyses. On fait une analyse la plus large possible. On s'attache vraiment à regarder comment la personne réagit, que cela soit le médecin, les aides-soignants comme la personne malade ou âgée.
Après ce recueil d'informations, on étudie la problématique qui nous intéresse.
On fonctionne en entonnoir pour définir ce que l'on cherche. On imagine l'esprit que le produit va avoir. On resserre donc sans cesse vers le produit parfait, le meilleur. C'est le fruit d'une longue réflexion.
Lorsqu'on travaille avec les industriels, on est renvoyé à une réalité économique et donc c'est un frein, notamment pour le remboursement. Lorsqu'un objet n'est pas ou peu remboursé, cela ne se vendra pas. On doit savoir comment le produit sera payé. On doit intégrer énormément de données du domaine de la santé. On prend vraiment en compte l'aspect financier, la vente. Trop de projets sont invendables à cause du financement.
Avec qui travaillez-vous en partenariat ?
On travaille en partenariat avec les industriels qui ont déjà leur propre réseau de médecins, de personnels de la santé.
Mais sinon j'ai aussi des contacts avec des infirmiers, des médecins, des hygiénistes, etc. On essaie d'avoir le plus de partenaires possibles.
Le designer n'a pas vocation à travailler seul. Lorsque je travaille seul, ce sont simplement des recherches.
Mais quand je travaille sur les robots ou les piluliers, je travailler avec des ingénieurs, des industriels, etc.
Le designer n'est pas là pour faire l'innovation mais pour l'accompagner ; faire en sorte que les produits soient utiles, utilisables et surtout vendables.
Il faut créer des choses simples et pratiques, réfléchies pour l'usager. Il doit être au cœur du produit, de la réflexion du produit.
On réfléchit beaucoup sur les scénarios d'utilisation et de services.
Propos recueillis par Aurélie JULIEN
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